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L'ère du temps, médiation scientifique par les Dealers de Science

Semaine de culture scientifique du 17 au 21 janvier 2017

PORTRAITS DU TEMPS

Ancre 1

L'économie en soutien de l'écologie

Jean-Christophe Pereau, professeur d'économie au laboratoire Gretha (1), évoque la notion de temps dans son domaine. Spécialiste des questions environnementales, il revient sur la nécessité de comprendre cette notion pour gérer au mieux la crise climatique.

En tant que professeur d'économie, pouvez-vous expliquer ce que représente le temps dans votre domaine ?

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Le temps est une notion, un concept en économie. L'économie part de questions simples en rapport avec le temps. Par exemple, le concept de coût d'opportunité est un concept fondamental dans ma discipline. En se consacrant à faire une tâche, un individu renonce à en faire une autre ailleurs. Le coût d'opportunité, c'est comparer ces deux tâches pour savoir quelle est l'action la plus rentable dans une même période.

Le taux d'actualisation, deuxième concept fondamental en économie, fait aussi intervenir la notion de temps. Il signifie que le temps a un prix. L'investissement d'une somme par un individu lui permet d'obtenir un pourcentage de bénéfice après un temps donné. C'est le principe d'un placement d'épargne. En renonçant à cet argent maintenant, il va recevoir une prime qui sera fonction du prix du temps. Le temps est donc bien un concept de base en économie.

 

Comment appliquez-vous ces concepts dans votre travail ?

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Je suis spécialiste des questions environnementales et je m’intéresse au taux d'actualisation qui a un impact très fort sur l'environnement. Les agents (2) préfèrent consommer les ressources environnementales maintenant et ne se projettent pas dans le futur. Cela induit un effet de « dictature du présent ». Mon travail est de comprendre comment gérer de façon efficace les ressources. Par exemple, je travaille sur la gestion des pêches où il est constaté ce qu'on appelle une tragédie des biens en commun. Il y a une surexploitation des ressources naturelles. L'objectif est simple : arrêter cette surexploitation pour obtenir un bénéfice dans l'avenir sans pour autant oublier les besoins présents des individus.

 

Par exemple, concernant le changement climatique, quelles seraient vos recommandations ?

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Le taux d'actualisation n'est pas le meilleur moyen de procéder. Il est difficile de demander à des individus de dépenser aujourd'hui pour obtenir un bénéfice faible et dans un futur lointain. Pour remédier à ce problème, il faudrait que l’État se substitue aux agents pour mettre en œuvre un investissement avec des rendements plus faibles car l’État peut être considéré immortel. Selon moi, il faudrait aussi des règles de seuil pour que les stocks de ressources restent au-dessus d’un niveau minimum. Ainsi, les ressources pourraient être consommées quotidiennement. Je travaille sur ces questions, notamment en lien avec des écologues qui ont une connaissance précise des écosystèmes.

 

Et économie et écologie font-elles bon ménage ?

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Chacun a des logiques différentes. Mon cœur de métier est soumis à des logiques économiques. Je m'efforce de créer des concepts en comprenant les données scientifiques pour les exploiter derrière. En outre, je dois prendre en compte l'urgence du changement climatique mais aussi les demandes de ressources des individus. Certains scientifiques, quant à eux, ont du mal parfois à comprendre ma logique. Pour eux, il faut une protection à tout prix de l'environnement. Cependant, il faut prendre en compte l'ensemble des paramètres, comme le fait que la trajectoire temporelle des individus et d'un écosystème est différente.

 

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(1) groupe de recherche en économie théorique et appliquée (unité CNRS et université de Bordeaux)

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(2) terme en économie qui désigne toute entité qui prend une décision économique (consommer, produire, faire un placement financier...)

Temps de lecture : 2 minutes

Écrit par Alexandre Saffre

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L'ère du temps, médiation scientifique par les Dealers de Science - Portraits interviews témoignages Jean-Christophe Pereau

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