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L’ergonomie, quand la machine apprend de l’humain

Stéphane Caro, professeur à l’université Bordeaux Montaigne, spécialiste de l’ergonomie des interfaces, présente cette discipline omniprésente mais méconnue.
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© Pixabay

C’est dans les années 1950 que « l’adaptation du travail à l’Homme », préfiguration de l’ergonomie, fait son apparition. Avant cette date, l’utilisation de machines est synonyme de haute technicité et n’est accessible qu’à un nombre restreint de personnes. C’est avec l’entreprise de matériel informatique Xerox qu’une nouvelle forme émerge à la fin des années 1970. « Il s’agit de faire en sorte que ce soit la machine qui s’adapte à l’Homme, et non l’inverse », nous explique Stéphane Caro. C’est dans cette optique que les interfaces graphiques remplacent les langages de commande sur nos ordinateurs et « c’est grâce à ce principe qu’un enfant peut utiliser un smartphone sans explication préalable ».

Le principe s’exporte à de nombreux autres domaines, notamment dans le monde du travail où « l’ergonomie s’est beaucoup intéressée à la sécurité, comme dans l’agencement des postes de contrôle, son étude dans ce cas précis permettant de ménager la santé des opérateurs et d’améliorer leurs performances ». Pour les appareils destinés au grand public, l’ergonomie devient un argument de vente : le consommateur choisit spontanément un produit facile d’utilisation. Ainsi l’ergonomie est une discipline qui applique différents champs de connaissances, dont une grande part de psychologie cognitive mais aussi de physiologie et d’anatomie, pour les mettre au service de l’interface humain-machine. Il doit en résulter un objet adapté à ses différents utilisateurs (facilité d’utilisation pour un novice, rapidité pour un utilisateur confirmé) à la tâche qu’il doit accomplir et dans une gamme de contextes prédéterminés (domestique ou professionnel, par exemple).

Une discipline mal comprise

Bien que mise en œuvre dans la conception de tous nos appareils, l’ergonomie est souvent associée à des concepts qui lui sont étrangers. « La confusion la plus courante se situe entre l’esthétique et l’utilisabilité. Si la seconde dépend bien de l’ergonomie, en se penchant sur les comportements humains, l’esthétique demande des compétences bien différentes, notamment en art, dont l’ergonomie ne se soucie guère. Si ces deux domaines peuvent travailler ensemble pour la conception d’un produit, ils ne doivent pas être confondus. » De plus, l’ergonomie souffre d’une comparaison avec les avancées technologiques. « Une avancée technologique peut être une catastrophe ergonomique. Un système, aussi complexe et performant soit-il, ne doit pas dépasser les capacités de traitement humaines, ou bien il sera inutilisable. »

Faisant un détour par la science-fiction, le professeur argumente que les robots y maltraitent l’ergonomie. « Un humain doit toujours pouvoir reprendre le contrôle de la machine, celle-ci ne décide jamais elle-même de l’action qu’elle va effectuer. On pourrait dire que la notion d’intelligence artificielle popularisée par le cinéma s’oppose au concept d’ergonomie. »

Maxence Nicolay

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